Deux précautions valent mieux qu’une

Le cinquième appel aux croyants rencontré dans le chapitre des femmes nous fait revenir vers le djihad dont nous avons largement parlé dans le chapitre de la famille d’Amram. L’appel concerne cette fois ci les mesures de sécurité dont doivent s’armer les croyants vis-à-vis de leurs adversaires..

يَا أَيُّهَا الَّذِينَ آمَنُواْ خُذُواْ حِذْرَكُمْ فَانفِرُواْ ثُبَاتٍ أَوِ انفِرُواْ جَمِيعًا {71}
71. Ô croyants ! Prenez vos précautions et partez en expédition par détachements ou en masse

Le djihad doit être décidé selon des règles scientifiquement établies prenant en compte tous les aléas. Il ne s’agit pas de se lancer dans des guerres fratricides sans fin ni objectif et d’engager des frais qui s’avéreront par la suite inutiles. Le djihad en Islam ne doit pas être considéré comme une fin en soi, même si la rétribution des moudjahidines dans l’au-delà est dite large et délicieuse. Le but du djihad en Islam n’est pas de tuer ou de semer la terreur parmi les populations humaines quelque soit les religions qui y prévalent. Que cela soit dit et noté une fois pour toute! Le prophète l’a maintes fois explicité. Le hadith parlant du djihad par rapport au jour du jugement dernier dit:

Quiconque tue un nourrisson ou un vieillard, brûle une oasis, déracine un arbre fruitier ou décime un troupeau ne pourra s’en sortir

L’objectif du djihad est donc de défendre les opprimés, sauver l’humanité de la mécréance et construire une société où règne la paix, la fraternité, l’égalité, la liberté et la tolérance. D’ailleurs la rétribution du moudjahid ne peut se concrétiser que si la raison, pour laquelle le djihad a été décidé, est bien fondée. Par ailleurs la déclaration de la guerre sainte ne peut émaner que de l’autorité suprême des musulmans. Et si tel n’est pas le cas, cette déclaration devient nulle et non avenue. Certes les croyants sont appelés à défendre leur foi, à hisser leur drapeau bien haut et à relever le défi en s’érigeant contre l’ennemi. Seulement cela ne doit pas se faire à n’importe quel prix n’importe quand, n’importe comment! Les musulmans se doivent de prendre les précautions nécessaires afin de ne pas tomber dans les embuscades ou les pièges qui peuvent leur être tendus aussi bien sur le plan militaire, politique, économique que spirituel. Une fois toutes ces précautions réunies.. Quand le bien fondé de la guerre est correctement défini et que sa préparation est bien finalisée.. à ce moment là, oui, il n’est plus permis de reculer et c’est pourquoi un vif reproche est adressé ici à ceux qui reculent ou qui tardent à prendre la décision de partir au djihad..

وَإِنَّ مِنكُمْ لَمَن لَّيُبَطِّئَنَّ
72. Et parmi vous, il y aura certainement quelqu’un qui rechignera et voudra faire reculer les autres

Ce type de comportement plutôt odieux ne peut émaner que d’un poltron ou d’un hypocrite qui veut semer le doute dans les rangs. Ce qui était justement le cas à Médine du temps du prophète et nous avons déjà parlé du cas de Abdallah Ibn Obay le chef des hypocrites qui n’avait pas supporté la venue du prophète. Or quand toutes les conditions du djihad sont réunies et que la déclaration de guerre est imminente, le musulman n’a plus le droit ni de reculer ni de démoraliser les troupes quelques soient sa position et son avis par rapport à la décision qui a été prise. Il ne faut pas oublier ici que la désertion est assimilée à un péché compromettant au même titre que le polythéisme et le meurtre. Nous aurons sans doute l’occasion d’en discuter à travers le chapitre du butin dont l’un des versets traite de ce point précis. Bien plus encore, à ce stade d’avancement des préparatifs de guerre, le croyant n’a même plus le droit de douter du bien fondé de son action ou d’avoir peur de perdre la vie au cours de la bataille. Il doit tout simplement aller au combat quelques soient les circonstances.. et bien sûr être confiant quant à son avenir. Car, dans le cas contraire, il se rendrait coupable de comportement hypocrite incompatible avec son statut de bon musulman.

Et quoiqu’il en soit, si le djihad auquel il participe ne venait pas à avoir une fin heureuse ici-bas, le croyant ne devrait surtout pas faire preuve de regrets car tout compte fait mourir en martyr est l’un de ses plus profonds souhaits.

فَإِنْ أَصَابَتْكُم مُّصِيبَةٌ قَالَ قَدْ أَنْعَمَ اللّهُ عَلَيَّ إِذْ لَمْ أَكُن مَّعَهُمْ شَهِيدًا {72}
et qui, si un malheur vous atteint, dira : certes, c’est par le bienfait d’Allah que je ne me suis pas retrouvé parmi eux

Seul l’hypocrite en effet, qui ne connaît pas la véritable finalité du djihad ou qui refuse de la reconnaître se réjouit de cette fin à priori tragique pour les autres. Par contre quand celle-ci par bonheur vient à être heureuse il se mord les doigts de ne pas avoir participé à l’expédition.. avouant par là de façon spontanée sa non appartenance au groupe..

وَلَئِنْ أَصَابَكُمْ فَضْلٌ مِّنَ الله لَيَقُولَنَّ كَأَن لَّمْ يَكُن بَيْنَكُمْ وَبَيْنَهُ مَوَدَّةٌ يَا لَيتَنِي كُنتُ مَعَهُمْ فَأَفُوزَ فَوْزًا عَظِيمًا {73}
73. et si une grâce vous atteint de la part d’Allah, il se mettra, certes, à dire, comme s’il n’y avait aucune affection entre vous et lui : Quel dommage ! Si j’avais été avec eux, j’aurais acquis un gain énorme

Car en effet celui qui s’abstient de participer à l’action d’un groupe auquel il appartient vraiment le fait à contre cœur ce qui n’est pas le cas ici. De même la logique voudrait qu’il ne regrette pas d’avoir été absent parce que son absence n’était pas intentionnelle. Lors de l’expédition de Mo’tah, certains compagnons pour des raisons insurmontables ne purent se joindre au Prophète. Une fois sur le chemin de retour il fit part aux présents du hadith suivant :

Il est à Médine des gens qui participent à vos actions. Les compagnons rétorquèrent : tout en étant à Médine? Eh oui car des contraintes réelles les ont empêchés d’être avec nous

Tout ceci pour dire l’importance de la sincérité dans l’intention.

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