Obéissance déplacée

Dans un précédent verset de ce même chapitre de la famille d’Amram, Allah avait appelé les croyants à ne pas trop se fier aux gens du livre de peur qu’ils ne les entraînent dans les dédales de la mécréance. Dans le seizième appel qu’Il leur adresse Allah fait allusion à la méfiance vis-à-vis de tous les non musulmans. En fait, cet appel intervient dans le sillage de la bataille d’Ohoud et de la défaite qui s’en est suivie. Cette bataille s’est produite en l’an III de l’hégire. Et, en effet, les hypocrites présents à Médine ainsi que certains infidèles avaient suggéré aux musulmans après leur défaite de réintégrer leur ancienne religion puisque l’Islam était devenu selon leurs dires obsolète. Or, la défaite n’avait d’autre but que de se constituer en épreuve destinée à faire faire aux musulmans une mise au point vis-à-vis de certains de leurs comportements irraisonnables qui étaient encore ancrées dans leurs esprits alors qu’ils étaient plutôt, en tant que fidèles de la nouvelle religion, appelés à prendre exemple sur les adeptes des prophètes qui ont précédé sidna Mohammed. Dieu a dit avant de lancer l’appel dont nous nous assignons l’analyse :

وَكَأَيِّن مِّن نَّبِيٍّ قُتِلَ مَعَهُ رِبِّيُّونَ كَثِيرٌ فَمَا وَهَنُواْ لِمَا أَصَابَهُمْ فِي سَبِيلِ اللهِ وَمَا ضَعُفُواْ وَمَا اسْتَكَانُواْ وَاللهُ يُحِبُّ الصَّابِرِينَ (146)
146. Combien de prophètes furent tués, en compagnie de beaucoup de leurs disciples, ils ne fléchirent pourtant pas devant ce qui les atteignit dans leur lutte pour la cause d’Allah. Ils ne faiblirent pas et ils ne cédèrent point. Allah aime les endurants.

Bien au contraire, les véridiques persévérèrent dans leur rapprochement vers Dieu malgré les difficultés en multipliant les prières et les invocations..

وَمَا كَانَ قَوْلَهُمْ إِلاَّ أَن قَالُواْ ربَّنَا اغْفِرْ لَنَا ذُنُوبَنَا وَإِسْرَافَنَا فِي أَمْرِنَا وَثَبِّتْ أَقْدَامَنَا وانصُرْنَا عَلَى الْقَوْمِ الْكَافِرِينَ (147)
147. Et ils n’eurent que cette parole : « Seigneur, pardonne-nous nos péchés ainsi que nos excès dans nos comportements, affermis nos pas et donne-nous la victoire sur le groupe des mécréants »

Et le résultat ne pouvait être que positif et sans équivoque dans les deux mondes..

فَآتَاهُمُ اللهُ ثَوَابَ الدُّنْيَا وَحُسْنَ ثَوَابِ الآخِرَةِ وَاللهُ يُحِبُّ الْمُحْسِنِينَ (148)
148. Allah, leur donna donc la récompense d’ici-bas, ainsi que la belle récompense de l’Au-delà. Allah aime les bienfaisants !

Ainsi, c’est après avoir dressé ce tableau des véridiques d’une époque antérieure que la mise en garde contre l’obéissance aux mécréants est intervenue..

يَا أَيُّهَا الَّذِينَ آمَنُوَاْ إِن تُطِيعُواْ الَّذِينَ كَفَرُواْ يَرُدُّوكُمْ عَلَى أَعْقَابِكُمْ فَتَنقَلِبُواْ خَاسِرِينَ (149)
149. Ô croyants ! Si vous vous fiez à ceux qui ne croient pas, il vous feront reculez. Et vous serez certainement perdants.

Ainsi la vigilance doit toujours être de mise en cas de négoce avec un quelconque adversaire. De plus, il ne faut jamais omettre de s’en remettre à Dieu qui reste le meilleur des soutiens.

بَلِ اللهُ مَوْلاَكُمْ وَهُوَ خَيْرُ النَّاصِرِينَ (150)
150. Car Allah, votre Maître, est le meilleur des secoureurs

Puis vint la révélation destinée à remettre un peu d’assurance dans les esprits des nouveaux croyants qui furent tellement secoués par la défaite qu’ils discutèrent même l’éventualité de demander au patron des hypocrites qu’était Abdallah ibn Obay ibn Saloul d’obtenir pour eux une trêve avec les qorayshites tellement la peur et le doute s’étaient emparés de leurs esprits.

سَنُلْقِي فِي قُلُوبِ الَّذِينَ كَفَرُواْ الرُّعْبَ بِمَا أَشْرَكُواْ بِاللهِ مَا لَمْ يُنَزِّلْ بِهِ سُلْطَانًا
151. Nous jetterons l’effroi dans l’esprit des mécréants du fait du polythéisme qu’ils ont adopté alors qu’ils n’ont reçu aucune preuve de la part d’Allah

On raconte qu’immédiatement après leur victoire à Ohoud les mecquois envisagèrent de marcher sur Médine et d’en finir une fois pour toutes avec Mohammed et les siens. Seulement Allah leur envoya un des leurs qui, parait-il, en raison d’une amitié qu’il entretenait avec eux n’avait pas trop aimé ce qui venait d’arriver aux musulmans et eut pitié d’eux. Il voulut donc leur donner un coup de main pour leur éviter un nouveau revers. Lorsque Abou Soufiane ibn Harb, le chef des qorayshites, le vit, il le questionna sur ce qu’il possédait comme informations à propos de Mohammed et son armée et le bonhomme, du nom de Maabad ibn oummi Maabad, lui répondit que le Prophète avait réuni une deuxième armée formée de tous ceux qui n’avaient pas participé la veille à la bataille ! Ce qui naturellement n’était pas tout à fait vrai mais cette information eut pour effet de faire peur aux qorayshites qui rebroussèrent chemin vers la Mecque sans demander leur reste. Ainsi les mecquois n’eurent guère le plaisir d’en finir avec les musulmans et leur victoire ne leur octroya aucun bénéfice en matière de châtiment divin dans l’au-delà puisque leur sort est fixé..

وَمَأْوَاهُمُ النَّارُ وَبِئْسَ مَثْوَى الظَّالِمِينَ (151)
Le Feu sera leur refuge. Quel mauvais séjour que celui des injustes !

Il est vrai que l’appel que nous avons analysé ici concerne spécifiquement les compagnons du Prophète, mais il faut faire remarquer que tous les versets de ce genre quoique a priori restreints s’appliquent à tout musulman qui se retrouverait dans une situation similaire à celle rapportée.

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