Le deuxième appel du chapitre du rang serré est à la fois un appel à la piété et au djihad qui sont considérés comme faisant partie des actions les plus en vues et les mieux rétribuées en Islam. On dit que cet appel a même été révélé avant le premier appel du chapitre que nous avons déjà eu l’occasion de commenter, et ce, en réponse justement au souhait qu’avaient émis un certain nombre de croyants et selon lequel ils auraient voulu connaître les actions les plus agréées par Dieu pour qu’ils puissent les effectuer au plus vite et obtenir ainsi, très rapidement, les faveurs divines.

يَا أَيُّهَا الَّذِينَ آَمَنُوا هَلْ أَدُلُّكُمْ عَلَى تِجَارَةٍ تُنجِيكُم مِّنْ عَذَابٍ أَلِيمٍ {10}
10. Ô croyants! Vous indiquerai-je un commerce qui puisse vous épargner un douloureux châtiment?

L’enjeu est de taille puisqu’il s’agit tout simplement de l’obtention de l’agrément divin et de l’absolution des péchés qui vont permettre au croyant de s’épargner les affres du châtiment. C’est tout comme si Allah Tout-puissant disait: « puisque vous recherchez l’agrément divin, il n’y a rien de plus simple, il vous suffit d’être sincères dans votre croyance et de ne point lésiner sur les moyens que vous déployez en faveur de la cause de Dieu »..

تُؤْمِنُونَ بِاللَّهِ وَرَسُولِهِ وَتُجَاهِدُونَ فِي سَبِيلِ اللَّهِ بِأَمْوَالِكُمْ وَأَنفُسِكُمْ ذَلِكُمْ خَيْرٌ لَّكُمْ إِن كُنتُمْ تَعْلَمُونَ {11}
11. Croire en Allah et en Son messager et combattre avec biens et personnes pour la cause d’Allah, cela est bien meilleur pour vous, si vous saviez!

Il ne faut surtout pas perdre de vue l’importance du respect des engagements. Quand on promet quelque chose il faut savoir l’assumer. Ce qui s’est passé lors de la bataille d’Ohoud est éloquent pour justifier ce rappel et il faut souligner que les diverses circonstances auxquelles l’homme se retrouve confronté ne doivent en aucun cas entamer sa détermination. Certes l’Homme a généralement tendance, pour un oui ou pour un non, à oublier la raison pour laquelle il se trouve ici bas. Or le but premier de son existence est bel et bien celui-là, le djihad sous toutes ses formes et il ne convient pas pour lui de l’omettre. Dieu ne dit-Il pas par ailleurs dans le chapitre du pays:

لَقَدْ خَلَقْنَا الْإِنسَانَ فِي كَبَدٍ {4}
4. Nous avons, certes, créé l’homme dans une lutte perpétuelle

Néanmoins, il ne faut pas comprendre par là qu’il faille tout abandonner et ne s’occuper que de prière, de jeûne ou tout autre acte de culte, délaissant définitivement les délices et les plaisirs terrestres surtout quand ils sont licites, car cela reviendrait à se mettre en porte à faux avec le réalisme dont faisait preuve le Prophète et qui caractérise notre religion. On rapporte en effet qu’un compagnon du nom de Othman ibn Madhôoun vint dire à Sidna Mohammed : « ô messager de Dieu, si tu m’en donnes l’autorisation, je quitterai ma femme, me ferais castrer et me constituerai en moine. Je ne mangerai plus de viande, je ne dormirai plus la nuit et je jeûnerai tout au long de l’année. Mais le Prophète lui répondit :
Ma tradition comporte le mariage et il n’y a pas de monachisme en Islam. Le seul monachisme qui puisse être accepté est le djihad pour la cause de Dieu. De même la castration qu’il nous est permis de pratiquer est le jeûne (il s’agit là bien sûr d’une image) et il ne vous est pas donné d’interdire les choses que Dieu vous a rendues licites ; telle est ma tradition et quiconque ne l’observe pas ne peut prétendre faire partie des miens.
Othman ibn Madhôoun rétorqua alors: « quel est donc ô messager de Dieu le meilleur des commerces à entreprendre avec Allah si je veux réussir? »? C’est là que le verset fut révélé à Sidna Mohammed en réponse à cette question.

تُؤْمِنُونَ بِاللَّهِ وَرَسُولِهِ وَتُجَاهِدُونَ فِي سَبِيلِ اللَّهِ بِأَمْوَالِكُمْ وَأَنفُسِكُمْ
11. Croire en Allah et en Son messager et combattre en personne avec tout ce que l’on possède pour la cause d’Allah

La réponse est on ne peut plus claire: « vous voulez faire du bien et êtes avides de rapprochement vers Dieu, alors soyez à la hauteur de vos engagements et ne reculez point. Autrement dit, démontrez votre sincérité en opérant la foi que vous prétendez porter en vous, et en honorant bien sûr le djihad pour la cause de Dieu exactement comme cela vous est demandé, c’est-à-dire par tous les moyens que vous possédez sans hésiter à faire de sacrifices si cela s’avère nécessaire. Il ne s’agit pas de se contenter de dire que l’on est croyant et de dormir ensuite sur ses lauriers, mais plutôt de se secouer en mettant en œuvre cette foi, en soi d’abord, puis, dans un deuxième temps, en s’attelant à appeler les autres à l’embrasser, et ce, par la pratique du djihad sous toutes ses formes, car la finalité pour un musulman est belle et bien de rester en permanence en état de djihad. Dieu dit dans un autre contexte:

وَجَاهِدُوا فِي اللَّهِ حَقَّ جِهَادِهِ
78. Et luttez pour Allah avec tout l’effort qu’Il mérite

Ce n’est que de cette manière que l’on peut prétendre réellement au pardon divin et partant de là à la récompense finale dans les jardins d’Eden.

يَغْفِرْ لَكُمْ ذُنُوبَكُمْ وَيُدْخِلْكُمْ جَنَّاتٍ تَجْرِي مِن تَحْتِهَا الْأَنْهَارُ وَمَسَاكِنَ طَيِّبَةً فِي جَنَّاتِ عَدْنٍ ذَلِكَ الْفَوْزُ الْعَظِيمُ {12}
12. Il vous pardonnera alors vos péchés et vous fera entrer dans des Jardins sous lesquels coulent les ruisseaux, et dans des demeures agréables dans les jardins d’Eden? Voilà l’énorme succès

Le fait de citer ici les jardins d’Eden et les demeures agréables, est comme l’explique Ibn Achour dans son exégèse du Coran, une motivation concrète supplémentaire pour les moudjahiddines qui, pendant le djihad sont loin de leurs demeures et se retrouvent nécessairement dans des conditions difficiles. Et à toute fin utile, si cela s’avère insuffisant comme motivation, il reste encore une récompense, terrestre cette fois ci..

وَأُخْرَى تُحِبُّونَهَا نَصْرٌ مِّنَ اللَّهِ وَفَتْحٌ قَرِيبٌ وَبَشِّرِ الْمُؤْمِنِينَ {13}
13. et autre chose encore que vous aimez bien : un soutien venant d’Allah et une victoire prochaine. Annonce donc la bonne nouvelle aux croyants

Tout ceci bien sûr à coté de l’agrément divin contenu dans la bonne nouvelle à laquelle il est fait allusion et qui était tant recherché par les musulmans et qui théoriquement est toujours sensé l’être.